
Boubakar BA est le premier mathématicien de l’Afrique noire qui a réussi brillamment son entrée à la très célèbre et très sélective école normale supérieure de Paris, Rue d’Ulm, en 1956. Il est agrégé de mathématiques, deux ans après, à seulement 23 ans ! Le journaliste nigérien Seidik Abba a porté un éclairage inédit sur le parcours de ce Nigérien d’une grande modestie mais qui a fait beaucoup pour la science en Afrique.
Boubakar Ba est né à Say, au Niger, le 29 décembre 1935, dans une famille de seize enfants. Il est mort en 2013 à Paris. Sa vie est pleine de prodiges. Lui-même en est un dont le destin va s’accomplir dans le grand ensemble territorial qu’était l’Afrique occidentale française. Il se présentait comme un « Aofien », le citoyen du grand espace de brassage.
Il a pu aller à l’école plutôt que tous les enfants de sa génération, à l’âge de seulement cinq ans. Il débute à l’école élémentaire de Diapaga, un petit village de la Haute Volta, aujourd’hui Burkina Faso, où son papa était fonctionnaire colonial. Diapaga, du fait de son éloignement et de son enclavement, était l’un des purgatoires de l’administration coloniale pour les fonctionnaires récalcitrants. Beaucoup de militants du Rassemblement démocratique africain y ont fait un passage.
Diapaga n’abritait qu’une école élémentaire de quatre classes ; école alors dirigée par le père de Philippe Ouédraogo, connu pour avoir franchi, fait très rare également, les portes de « Polytechnique », promotion 1964. Le père de Ouédraogo, en pédagogue avisé a recruté Boubakar Ba, en lequel il voyait des capacités exceptionnelles. Il épuise le cycle de l’école élémentaire et doit se rendre à Fada N’Gourma pour les deux niveaux du cours moyen.
Il revient à Niamey pour fréquenter le Collège moderne qui venait d’ouvrir ses portes. L’élève n’a que onze ans, mais retient forcément l’attention au point d’être retenu, avec deux autres condisciples, Dan Koulodo et Yahaya Abdou, pour se rendre au lycée « Van Vollenhoven » de Dakar, l’un des rares établissements d’enseignement secondaire accessibles aux indigènes. Aujourd’hui, ce lycée a pris le nom de Lamine Guèye. Quand il arrive à « Van Vollenhoven », l’administration scolaire est persuadée que le jeune écolier vient pour la sixième et non pour le lycée. Il est vrai qu’il ne mesurait que 1m 47.
à Dakar, l’enfant venu du Niger bénéficie pour la première fois de « conditions de vie plus favorables » avec des lits, des draps, de l’eau courante et de l’électricité permanente. Il peut aussi accéder à une bonne nourriture. C’était la vie des internes des lycées qui ont fait le bonheur des futurs cadres africains aussi bien sur le plan de la formation intellectuelle que sur l’intégration des consciences.
De Diapaga à Paris
Boubakar Ba est « premier » de la classe et du lycée. Il passe son baccalauréat et opte pour les mathématiques à « l’Institut des hautes études » de Dakar, l’embryon de la future université de Dakar, le fleuron de l’enseignement supérieur en Afrique occidentale française.
En 1954, il décroche son diplôme avec « mention bien ». C’est à cette époque, qu’il croise le Sénégalais Abdoulaziz Wane, diplômé de l’école centrale de Paris (1954), un autre gotha du savoir en France. Abdoulaziz Wane présente Boubakar Ba à Léopold Sédar Senghor. Les deux vont l’aider à avoir ses marques en France. Ils vont surtout l’orienter vers le lycée Hoche de Versailles pour les « mathématiques supérieures ».
Un an après, il arrive à « Louis le Grand » pour continuer avec les « mathématiques spéciales ». C’est là que tout va s’accélérer pour lui. Il est admis à l’école normale supérieure. C’était un coup de tonnerre car il était le premier africain à accéder à cette école d’élite. En 1958, il est agrégé de mathématiques en même temps qu’il devient « Attaché de recherche » au centre national de la recherche scientifique. En 1965, il soutient sa thèse de doctorat et devient « maître de conférence ».
À l’issue de sa formation et après un premier enseignement à Rennes, il vient à Dakar pour enseigner les mathématiques en compagnie de son ami Alassane Sy de la Mauritanie. Après trois ans, il s’envole pour Madagascar. Il y fonde en 1968, « l’Institut de recherches en mathématiques ». Sur place, il fait la connaissance d’un certain Thomas Sankara, alors en formation à l’école militaire d’Antsirabé.
Seidik Abba rapporte que Boubakar Ba se rend très vite compte de l’intelligence politique de Sankara. Il insiste sur sa « culture politique » et « une vraie conscience des enjeux africains (…) ».
C’est de Madagascar que l’état du Niger fait appel à son prodige pour ouvrir le « centre d’énseignement supérieur », un pas décisif avant l’ouverture de l’Université de Niamey. Il en est le premier Recteur de 1971 à 1979 ; titre qu’il gardera pour l’éternité.
Le futur président Mahamadou Issoufou fait partie des premiers étudiants de cette institution. Sa présence à Niamey va prendre brutalement fin quand les militaires, avec à leur tête l’ancien tirailleur Seyni Kountché, vont prendre le pouvoir. Il est mis à l’écart. Il en profite pour se rendre utile à l’Université d’Abidjan et en France, à « Paris XIII-Villetaneuse ».
L’université de Tillabéry porte son nom
Se souvenir de Boubakar Ba, c’est remettre sur la place publique la culture de l’effort dans un système qui n’a pas fait de cadeau aux Africains. Il appartient à la génération de Senghor, qui même ayant échoué au concours d’entrée à l’école normale supérieure est devenu agrégé de grammaire en 1935 !
C’est du même circuit qu’a émergé Abdou Moumouni, agrégé de sciences physiques en 1956 et docteur dans la même discipline en 1957 ; le polymathe Cheikl Anta Diop, Joseph Ki-Zerbo, agrégé d’histoire en 1956, Bakary Kamian, le premier africain agrégé de géographie en 1964.
Dr Ibrahim MAÏGA
ibrahimmaiga@yahoo.fr
Boubakar Ba et le Mali
Entre Boubakar Ba et le Mali s’est nouée une relation solide. Il a présidé en 1973 à Bamako, pour le compte du Centre pédagogique supérieur le jury qui a consacré, sur place, des cadres maliens en leur délivrant le titre de docteur de troisième cycle. Le Centre Pédagogique Supérieur, alors rattaché à l’Ecole normale supérieure, était le fruit d’une collaboration originale entre l’Unesco, la France et le Mali pour assurer la formation des formateurs nationaux dans plusieurs domaines : mathématiques, physique, chimie, biologie, linguistique, lettres, sciences humaines.
Bakary Traoré est le fruit de cette collaboration. Il a soutenu sa thèse de doctorat sur le thème des « Courbes généralisées de L.C. Young et contrôl optimal ».
Il n’était pas seul. Il y a eu en 1975:
- Niamanton Diarra en algèbre avec une thèse « à propos des ensembles flous » ;
- Oualy Konté sur « : Les fonctions convexes et la théorie de la dualité », Tiémoko Mallé en « géométrie discrète »,
- Kalilou Maguiraga, « Sur les relèvements des chemins dans les feuilletages de la co-dimension un » ;
- Massiré Sangaré, « Une théorie complète des systèmes dynamiques généraux »….
Tous ces mathématiciens ont obtenu la reconnaissance nationale et internationale par la qualité de leur enseignement.
En fait, Boubacar Ba ne faisait que prolonger la longue tradition de recherche entre le Niger et le Mali portée par Abdou Moumouni, le premier africain agrégé de sciences physiques ; un des concepteurs du centre régional de l’énergie solaire.
I.M
Mali : Notre Patrie, ses Hommes, sa Mémoire
L’OUBLIÉ DE MONTLUÇON
Entre la date, désormais historique, du 14 janvier 2022 , jour d’appel aux rassemblements et manifestations populaires pour dénoncer le complot France - CEDEAO contre le Mali, et celle du 20 janvier , fête de l’Armée malienne, la date du 16 janvier vient nous rappeler un autre moment important de notre histoire.
En effet, rappelons-nous, c’est le 16 janvier 1943 que l’illustre Chérif de Nioro, Cheikh Hamahoullah Ould Mouhammedou Ould Seydina, en déportation en France, a rendu l’âme à 16 h 30 à l’hôpital de Montluçon, à près de 350 km de Paris. Cheikh Hamahoullah, est le père de l’actuel Chérif de Nioro, Cheikh Mohamedou dit Bouyé . Il est aussi celui de Baba Ould Cheikh Hamahoullah et de Cheikh Sid’Ahmed Ould Cheikh Hamahoullah, tous deux condamnés à mort le 30 juin 1941 et fusillés le même jour (11 novembre 1941) par l’Administration coloniale française à Yélimané.
Quel macabre bilan ! Un bilan qui n’est pourtant que la partie visible de l’iceberg de malheurs, d’injustices et d’atrocités commis contre notre peuple, car c’est à cette même époque que tombaient sous les balles 31 autres condamnés à mort et que d’autres bagnards de Yélimané étaient astreints aux travaux forcés pour 10 ans et plus. Comme le soulignait également un adepte mauritanien du hamallisme, « l’État français est pleinement responsable de la détention de Cheikh Hamahoullah en Algérie, à Vals - les -Bains et de sa mort dans des conditions inhumaines à Montluçon. Il est également coupable de l’internement et de la mort de milliers de ses partisans dans des camps de Kidal, de Bourem, comparables à bien des égards à ceux de Buchenwald et d’Auschwitz. »
*Amadou Hampâté Bâ précisait que « les fidèles de Chérif Hamallâh, notamment tous ses principaux moqaddem furent déportés et dispersés aux quatre coins de l’Afrique occidentale et équatoriale française. »
*Les exécutions à Bobo Dioulasso (18 prisonniers) le 10 octobre 1941 avec un cortège de condamnations aux travaux forcés de 5 à 20 ans, les massacres d’innombrables civils considérés comme émeutiers à Ouani, Bourem, Ansongo, Kayes, Bamako, Nioro (Mali), Kaédi, Tamchakett, Aïoun (Mauritanie)… ne font pas partie de cette série macabre.
Désormais, le Cheikh Hamahoullah résistant anticolonialiste, ayant purgé une 1ère condamnation de 10 ans de prison qui le conduisit d’abord de Bamako, le 25 décembre 1925, à Méderdra (Mauritanie -juillet 1926 à avril 1930) puis à Adzopé (Côte d’Ivoire 1930 à janvier 1936) ensuite à Cassaigne (Algérie - 19 / 22 juin 1941 au 9 avril 1942), lui, le natif de Nioro du Sahel repose au « cimetière de l’Est de la ville de Montluçon au carré n°1 dans la tombe n° 12 sur la ligne 20. »
*Cet endroit aujourd’hui, bien connu et régulièrement fréquenté par de nombreux visiteurs n’est cependant pas la première tombe du Cheikh. En effet, dans ce vaste cimetière il existe 2 « carrés »: l’un est considéré comme « le carré commun » et l’autre comme plus « sélect »
Le « carré commun » bien que n’étant pas une fosse commune, est constitué uniquement de tombes susceptibles de changer d’occupants suivant la fréquence des décès. Il est, pourrait-on dire, le cimetière public. Par contre, les conditions d’accès des sépultures au 2è carré étaient plus drastiques du point de vue de la tarification en vigueur. Mais elles avaient l’avantage de garantir l’inviolabilité de la tombe pendant près de 100 ans.
à sa mort, le Cheikh fut inhumé d’abord dans « le carré commun » le 19 janvier 1943.
C’est à la suite d’une visite de trois célèbres amis du Cheikh ( Félix Houphouët Boigny, Amadou Hampâté Bâ, Tiécoura Diawara) que la sépulture de ce grand homme fut déplacée, en 1956, du « carré commun » à l’autre carré. Depuis ce moment fatidique jusqu’à nos jours, qu’avons-nous fait pour illustrer la mémoire de celui que nous considérons comme l’une des prestigieuses figures de notre nation ?
Samba Lamine Sow
Inspecteur principal de sécurité sociale à la retraite (Sébénicoro)
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*1-Alioune Traoré : Cheikh Hamahoullah- Homme de foi et résistant
*2-Amadou Hampâté Bâ: vie et enseignement de Tierno Bokar, le sage de Bandiagara.
*3-Amadou Doucouré, conseiller de la République du Soudan français: pèlerinage à Montluçon sur la tombe de Cheikh Hamallah
Rédaction Lessor
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