Ramadan et mariage : La mariée, la bouillie et la félicité

Elle doit affronter les corvées liées à la préparation des repas, faisant face à sa propre impréparation et à la colère des convives

Publié jeudi 20 mars 2025 à 08:11
Ramadan et mariage : La mariée, la bouillie et la félicité

Le mois de Ramadan représente un défi énorme pour les nouvelles mariées, désignées souvent par ceux qui ont le sens de la dérision comme les  «les préparatrices de bouillies». Les veilles de ramadan les mariages se multiplient. À titre d’illustration, la mairie de la Commune V a célébré 767 mariages en février dernier contre 236 en janvier passé pour l’hôtel de ville de la mairie Commune IV. Ces statistiques attestent de la fréquence des mariages les semaines d’avant Ramadan. Des célibataires voire des célibattants affluent devant les officiers d’état civil, très fréquemment pendant les deux ou trois mois qui précèdent le mois de Ramadan, pour intégrer le club des mariés. Mais surtout pour passer le mois béni dans de meilleures conditions psychologiques, morales et alimentaires avec des épouses disponibles pour faire la cuisine.     

Pourtant, c’est une tâche immense qui entend les nouvelles élues des cœurs. Celles-ci  doivent préparer les repas pour leurs époux et belles-familles durant ce mois béni. Les cordons bleus s’en sortent souvent avec le satisfecit de la famille. Elles sont souvent élevées au rang de houris (ces femmes promises aux croyants dans le paradis). C’est une toute autre appréciation pour les nouvelles mariées qui n’excellent pas dans l’art culinaire et qui n’arrivent même pas à bien préparer la bouillie de rupture de jeûne. «Ma belle-sœur est une nouvelle mariée. En cette période, elle prépare mal la bouillie. Il n’y a même pas de grain. Dieu m'en est témoin», dénonce Oumar Diarra, un étudiant.


Celles qui ne sont pas toujours préparées à ce qui les attend rencontrent des surprises comme le cas de cette jeune fille qui s’est mariée à deux semaines du ramadan. Elle témoigne sous anonymat. «Je viens de me marier et n’étais pas préparée à tout ça. Ici, on me laisse seule. Le matin, on me donne l’argent de la popote et personne ne s’intéresse plus à ce que je fais. Chacun s’attend à une table garnie lors de la rupture. Je ne m’attendais pas à ça. Chez nous, ma mère m’aurait aidée», confie-t-elle avec une pointe d’amertume.

Il est 4 heures dans la famille Diallo à Kalaban coro. Aminata,17 ans, est déjà active pour servir cette famille élargie de plus de 60 membres dont une dizaine de femmes. «C’est mon premier ramadan en tant que femme mariée. Dans la famille, il y a beaucoup de belles-sœurs, mais aucune d’entre elles ne lève le petit doigt pour m’aider. Je me demande pourquoi cette indifférence à mon égard. Des fois, je prépare, et la famille se plaint en disant que c’est fade, mais je fais avec», déclare-t-elle. Aminata qui vient d’une famille nucléaire n’apprécie guère de vivre dans une telle atmosphère. Et de préciser que le slogan de sa belle-famille-famille est : «Tu t’es mariée pour ça, il faut assumer».



Le nombre croissant de mariages célébrés souvent un mois avant le début du Ramadan, c’est pour préparer Sounkalo Mankono



Nombreuses sont ces jeunes filles qui, même si elles ne l’expriment pas ouvertement, ressentent un regret intérieur, comme l’explique Fanta Cissé, dont la belle-famille habite à Baco Djicoroni Golf, en Commune V du District de Bamako. «Moi, je conseillerais à toutes les filles de ne pas se marier à l’approche du ramadan. Ça enlève toute l’allure d’une nouvelle mariée. Entre incompréhension, cuisine, cherté des condiments et organisation, il faut être prête», affirme-t-elle. 

Mais certaines nouvelles mariées piochent des recettes sur les réseaux sociaux ou on recourt à des produits pré conditionnés dans des sachets comme des grains secs de bouillie. C’est du moins ce qu’affirme Aïcha Diarra à Torokorobougou, drapée dans un boubou de nouvelle mariée et foulard au rein. 
«S’il arrive que je me perds, plusieurs femmes sont sur Tik Tok pour nous apprendre des recettes comme Mamy ka épices, secret de cuisine ou encore Tatiakasougouba.


MANGER LA BEAUTE- Il me suffit de me performer en avance et pour les bouillies, c’est disponible dans les supermarchés. Au début, j’avais vraiment des difficultés mais aujourd’hui je m’en sors», indique-t-elle en dressant la table pour la rupture. Pour préparer les nouvelles mariées à ce qui les attend, Mme Sissoko Metou Dembélé, conseillère matrimoniale à Daoudabougou insiste sur l’importance de l’éducation et de l’engouement pour les mariages à l’approche du ramadan.


«Le mois passé, j’ai suivi 18 filles dans leurs mariages à la veille de ce mois de ramadan. Je leur ai conseillées d’être à hauteur des attentes de leurs belles-familles en termes de tâches  domestiques surtout culinaires», explique celle qui  regrette des difficultés d’initiation des jeunes filles. Ceci résulte d’une faible communication entre les mamans et leurs filles. «On ne leur apprend pas comment gérer un foyer, encore moins une famille pendant le ramadan», souligne la conseillère matrimoniale.

Elles sont nombreuses, ces filles, dont les belles-familles se plaignent comme le déclare Mme Sidibé, une dame de 88 ans. «Ces filles pensent qu’on mange la beauté. Je recadrais toutes mes belles-filles qui ne savaient pas cuisiner. Elles avaient le choix de partir, car je ne peux pas accepter ça dans ma famille», déclare l’octogénaire, tout e continuant à égrener son chapelet. Se marier à l’approche du mois béni n’est pas une tendance selon le sociologue Savadogo Modibo. Il invite les parents à enseigner les notions culinaires élémentaires sur les recettes locales à leur progéniture avant que celles-ci ne se mettent en union avec leurs conjoints.

Selon lui, l’une des raisons du nombre croissant de mariages célébrés généralement un mois avant le début du Ramadan, c’est pour préparer le mois qui précède le Ramadan dénommé en bamanakan «Sounkalo Mankono», un mois béni, tout comme le Ramadan. Mais dans la société, trop de spéculations tournent autour des jeunes filles, notamment leur manque de maîtrise de la cuisine et plusieurs divorces y sont liés car toutes les familles ne peuvent pas supporter une femme qui ne sait pas cuisiner», fait observer le sociologue.


Aminata DJIBO

Rédaction Lessor

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