Spécial 22 septembre 2024: #Mali : Musique malienne : Le rap prend son envol

Des rappeurs expliquent clairement que ce mouvement musical permet de décrier, sans prendre des gants, des problèmes qui minent la société. Dans les argumentaires qu’ils développent, la culture demeure en filigrane

Publié jeudi 19 septembre 2024 à 11:44
Spécial 22 septembre 2024: #Mali : Musique malienne : Le rap prend son envol

Master Soumy représente un exemple de réussite

 

 

Connaissez-vous Fresh K de Ségou-Pelengana, Issa Mamadou Dembélé dit IMD de Bla, Jean Koné dit Efferalgan Djiwili Davia de Tominian-Mandiankuy, Boureima Traoré dit Bamana Boureima de San, Youssouf Traoré dit JP Moula et Abdramane Traoré alias Daraja Wesh de Ségou ? Ces noms ne vous sont certainement pas familiers. Pourtant, ces jeunes rappeurs commencent à crever le plafond de verre. Ils sont aujourd’hui des stars locales et régionales à Ségou et San. À Bamako aussi, de nombreux talents, moins connus du grand public, s’expriment dans ce mouvement musical.

Les Régions de Kayes, Sikasso, Dioïla, Mopti, Bandiagara voire Gao et Tombouctou possèdent chacune leur légion de rappeurs. Le rap est un genre musical, considéré, il y a peu, comme un phénomène éphémère. Mais, il a pris de l’ampleur et s’est aussi imposé dans notre pays.

 En plus, il y a des concerts, des concours, des festivals et des studios d’enregistrement qui sont dédiés à cette musique. Mieux, notre pays tend vers son industrialisation. Le «Kôrès hip hop» qui met en compétition les jeunes de la Région de Ségou, le «Festi hip-hop rapou dokokoun» de Master Soumy ou le Festival «Le Mali a des rappeuses» d’Ami Yèrèwolo sont, entre autres, des initiatives qui s’inscrivent dans cette vision.

Lassine Coulibaly dit King Massassi, l’un des premiers à embrasser ce genre musical avec le trio «King Da Dja» (un groupe de rap qui existait dans les années 90), explique simplement que le rap fait désormais partie intégrante de notre culture. Il n’a pas été une étoile filante comme le prédisaient ses détracteurs.

 

 PRODUCTION DE RAPPEUSES- Ami Yèrèwolo est une auteure-compositrice-rappeuse, productrice et créatrice du style Denfari. Celle qui est détentrice d’une Licence en finances et comptabilité crée une fusion teintée de hip-hop et de musique mandingue. Ce qui lui confère une réelle singularité avec un rap énergique mêlant des vibrations et sonorités maliennes en particulier et africaines en général. Après 15 ans de carrière, elle a déjà mis sur le marché trois albums et tourne régulièrement dans les festivals et rendez-vous culturels en Afrique et en Europe. La rappeuse explique : «Le rap, c’est aussi une entreprise, car dans chaque activité qu’on commence, il faut savoir ce qu’il faut pour gagner. Dans une entreprise, il faut d’abord avoir un plan et des stratégies clairement établis».

Ami Yèrèwolo a, d’abord, créé son entreprise de communication, ensuite le festival dénommé «Le Mali a des rappeuses». Près de 80% des rappeuses sont passées par ses mains, explique modestement l’icône du rap féminin. Elle cite volontiers Faiza, Wassa Coulibaly, Lisha, Koro la Diva, et Black AD qui a remporté, l’année dernière, le concours Découverte RFI. Ami Yèrèwolo entend «devenir d’abord le numéro 1 du rap mondial».

Amadou Bandjougou Gakou Bouaré dit Young BG est un autre exemple de réussite dans le rap. Il détient le record de ventes au Mali, établi en 2022. Avec son 2è album intitulé «Yeelen», il a vendu plus de 4.300 exemplaires pour une somme de plus de 8 millions de Fcfa sur la plateforme de vente en ligne «Empire Afrique».

Pour Master Soumy, ils ne sont pas nombreux les rappeurs qui arrivent à avoir un bon cachet pour les prestations. Certains gagnent des millions en organisant leurs propres concerts. Mais ceux qui arrivent à tirer leur épingle du jeu se comptent sur les doigts d’une main. Parmi ceux-ci, on peut citer les ténors comme Iba One, Mylmo N’Sahel, Gaspi, Malakey ou Adji One qui sont au sommet de leur art.

Le jeune Adji One est le premier artiste malien à remplir les 50.000 places du Stade du 26 mars. Mais, cela n’est pas un secret qu’une grande partie des tickets d’entrée ont été payés par des parrains et des sponsors. Par contre, un an après, soit au mois de juillet 2023, Malakey a pu vendre pratiquement toutes les places directement à ses fans. Ce qui constitue un record en la matière.

 

MAUX DE LA SOCIÉTÉ COMME THÈMES- Pour King Massassi, il n’y a pas de doute, le consommateur malien se dirige de plus en plus vers le rap, car cette musique apporte de la fraîcheur. C’est une musique très souvent engagée où les jeunes s’attaquent directement et sans filtre aux maux de la société. Ami Yèrèwolo explique cette explosion du nombre de jeunes rappeurs par les formations et autres festivals qui sont organisés dans le pays. Un propriétaire de studio d’enregistrement, qui préfère garder l’anonymat, estime qu’il est de plus en plus facile de faire des beats ou rythmes avec des sons préconçus à partir d’ordinateurs.

Ce qui explique une grande ressemblance entre beaucoup de morceaux. Il suffit parfois d’ajouter quelques phrases pour obtenir un autre morceau. C’est, d’ailleurs, ce qui explique le fait que de nombreux jeunes rappeurs ne peuvent faire des prestations publiques qu’en Play-back. Ils apportent au technicien leurs sons sur une clé USB souvent dans leurs téléphones portables. Il y a aussi le développement des home studios (des petits studios d’enregistrement à domicile) pour pouvoir travailler à tout moment.

Néanmoins, Master Soumy estime que le rap malien a beaucoup évolué par rapport à une période assez récente. «J’ai toujours dit que le rap malien a vraiment évolué sur le plan technique. Je précise bien sur le plan technique parce que quand on regarde auparavant les rappeurs maliens étaient obligés d’aller enregistrer leurs chansons dans les pays voisins (Sénégal, Côte d’Ivoire et Burkina FASO)», ajoute-t-il. Aujourd’hui, on a chez nous beaucoup de studios adaptés à la création et à la production de la bonne sonorité hip-hop.

 Avant, il n’y avait qu’un seul studio spécialisé en hip-hop à Bamako qui pouvait faire des sons dignes de ce nom. Ce qui constituait un vrai casse-tête pour les rappeurs et le développement de cette musique. Il fallait aussi avoir les moyens pour se déplacer.

Toutefois, beaucoup de bons studios ont émergé cette dernière décennie, notamment Ben Aflo design, Visco, etc. «Nous avons même des beatmakers actuellement qui sont recherchés dans la sous-région. C’est par exemple un beatmaker malien qui a réalisé l’avant-dernier album du grand rappeur sénégalais Didier Awadi», souligne Master Soumy.

Avant d’ajouter qu’il y a beaucoup de choses à parfaire dans le rap malien. Il y a des jeunes talentueux qui font de bons beats, de bonnes mélodies, mais peu de messages positifs et constructifs. Il faut qu’une partie de la musique soit ancrée dans les esprits pour susciter des réflexions. «Notre pays rencontre actuellement beaucoup de difficultés, nous sommes à la croisée des chemins. C’est cela que nous devons chanter afin d’éveiller les consciences. Nous avons des problèmes d’eau, de santé et d’école. Les Américains ont d’autres problèmes. Il faut que l’on comprenne que ‘’Time square’’ n’est pas le ‘’Dabanani’’, New York n’est pas Bamako. Nous devons travailler aussi au retour de la paix et de la sécurité», conclut Master Soumy.

Youssouf DOUMBIA

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