Coopération judiciaire au sein de l’AES : Les jalons d’une justice commune posés à Bamako et à Niamey

L’histoire, la géographie, les réalités socio-culturelles et les défis sécuritaires sont autant de dénominateurs communs aux trois États de la Confédération des États du Sahel (AES).

Publié lundi 22 décembre 2025 à 09:16
Coopération judiciaire au sein de l’AES : Les jalons d’une justice commune posés à Bamako et à Niamey

Réunion des ministres de la Justice de l’AES à Ouagadougou, septembre 2025

 

Confrontée au terrorisme, au blanchiment de capitaux, à la prolifération d’armes et d’autres formes de criminalité transnationale, ces difficultés ont incité les autorités de la Confédération à réfléchir sur la mise en commun de synergies d’actions et de moyens efficaces dans tous les secteurs qui concourent à la lutte contre ces fléaux. Le caractère transnational de ces fléaux ne laisse guère le choix que d’engager la réflexion autour des solutions à l’échelle de l’AES en mettant l’accent sur un droit harmonisé voire unifié avec une institution judiciaire commune bénéficiant d’une coopération et d’une entraide judiciaire efficaces.

La justice est au cœur de tout processus de développement, en raison de sa vocation de régulateur des rapports sociaux, de garante des droits et libertés, de pilier de l’État de droit. Elle a rôle déterminant à jouer dans l’espace confédéral car c’est à elle que revient la charge de réprimer les infractions issues des agissements criminels. La création d’un cadre de concertation jetant les bases d’une justice forte au service des peuples de la Confédération AES semble opportune et plus que nécessaire pour consolider la quête de souveraineté.

C’est pour cela qu’il y a eu une première rencontre des ministres chargés de la Justice de la Confédération à Bamako en mai dernier. Les discussions ont porté sur les conclusions des travaux des experts sur le renforcement de la coopération judiciaire et pénitentiaire, l’uniformisation du droit de la Confédération, la création d’institutions judiciaires communes et l’harmonisation des textes juridiques. Cette première rencontre ministérielle, qui a permis d’échanger sur le rôle du secteur judicaire dans la construction de l’espace confédéral, a été sanctionnée par un communiqué final. 

Le traité fondateur de la Confédération a retenu trois domaines de compétence qui sont la Défense et la Sécurité, la Diplomatie et le Développement. Parmi les résolutions de la rencontre, les ministres de la Justice de l’AES, Mamoudou Kassogué du Mali, Edasso Rodrigue Bayala du Burkina Faso et Alio Daouda du Niger, ont approuvé la proposition de modification de l’article 4 du traité instituant la Confédération pour y intégrer le domaine de la Justice et du Droit parmi les compétences déléguées. Mais aussi, la création d’un cadre de concertation permanent entre les ministères de la Justice de l’espace en vue d’échanger sur les sujets d’intérêt commun.

Constatant l’emprise négative de puissances impérialistes sur l’organisation et le fonctionnement de certaines instances juridictionnelles régionales et internationales, les Gardes des Sceaux de la Confédération ont insisté sur la nécessité de mettre en place des instances juridictionnelles et arbitrales confédérales chargées de connaitre du contentieux de l’interprétation et de l’application du Traité, des actes dérivés, du contentieux des actes des organes de la Confédération, du droit des affaires, de l’arbitrage et de la médiation, d’une part. Mais aussi, de connaitre des infractions des crimes de génocide et des crimes d’agression, de terrorisme et de financement du terrorisme, de blanchissement de capitaux et de violation graves des Droits de l’Homme et de toutes autres infractions graves et assimilées, d’autre part.

HARMONISER LA FORMATION INITIALE ET CONTINUE- La rencontre de Bamako a aussi permis aux ministres chargés de la Justice de l’AES de donner leur aval sur les recommandations relatives à l’harmonisation des statuts et textes régissant les professions libérales du secteur de la Justice, en soutenant la mise en place d’un comité d’experts chargé de rédiger des textes communs en étroite collaboration avec les acteurs concernés. 

La coopération judiciaire figure parmi les résolutions de la rencontre. À ce propos, les ministres ont validé la conclusion d’accords tripartites renforçant l’entraide judiciaire, l’extradition et le transfèrement des personnes privées de liberté. De même que l’harmonisation des législations pénales, notamment sur le terrorisme et la criminalité transnationale organisée.

S’agissant de l’extension du bénéfice de l’assistance juridique et judiciaire aux ressortissants des États membres de la Confédération, les ministres de la Justice de la Confédération ont encouragé la mise en place d’une plateforme numérique de coopération judiciaire. Mais également, la création d’un fichier unique des personnes recherchées, poursuivies ou condamnées pour crimes contre l’humanité, terrorisme et financement du terrorisme, blanchiment de capitaux, prolifération des armes de destruction massive et toutes autres infractions graves et assimilées.

S’agissant du volet formation, Mamoudou Kassogué et ses homologues du Niger et du Burkina Faso ont décidé d’organiser des formations conjointes des acteurs judiciaires et de mutualiser les ressources techniques pour renforcer l’efficacité des systèmes juridiques et judiciaires.

La coopération pénitentiaire n’a pas été occultée dans les recommandations. Sur ce point, les Gardes des Sceaux de la Confédération ont souligné l’importance de renforcer la coopération en matière de renseignements, de lutte contre la radicalisation et l’extrémisme violent, de sécurisation des prisons et de gestion des détenus, en particulier ceux arrêtés pour terrorisme. C’est dans cette dynamique qu’ils ont approuvé la construction d’une Prison de haute sécurité (PHS) liée à la future Cour pénale sahélienne et des droits de l’Homme (CPS-DH), ainsi que l’harmonisation des statuts du personnel pénitentiaire conformément aux règles internationales. 

D’autres recommandations portent sur l’importance d’harmoniser la formation initiale et continue des acteurs judiciaires et pénitentiaires par la création d’un Centre régional de formation judicaire et d’un Centre de formation pénitentiaire de l’AES. Mais aussi, la promotion de la réinsertion sociale, du respect des droits humains en milieu carcéral et des mesures alternatives à l’emprisonnement.

Les Gardes des Sceaux ont, en outre, validé la création de cadres réguliers d’échanges entre écoles de formation des administrations pénitentiaires des États membres, ainsi que la collaboration dans le domaine du renseignement pénitentiaire et du partage d’informations. S’y ajoute l’approbation d’une proposition de mise en place des comités techniques nationaux chargés de veiller à l’harmonisation des symboles des États de la Confédération, du suivi et de la mise en œuvre des recommandations issues de la rencontre.

La deuxième réunion des ministres chargés de la Justice de la Confédération s’est tenue le 15 septembre dernier à Niamey au Niger. Ils ont proposé d’accélérer l’opérationnalisation et la coordination des comités nationaux de suivi et de mise en œuvre des recommandations de Bamako, mais aussi de réexaminer la coopération pénale internationale entre les états de l’AES et d’autres états ou juridictions et organismes régionaux et internationaux.

Les ministres ont aussi recommandé d’accélérer la mise en place des instances juridictionnelles annoncées dans le communiqué final de la réunion de Bamako par l’élaboration des projets de textes relatifs à la création, à l’organisation et aux fonctionnement dédites instances. Mais également d’accélérer le renforcement de la coopération juridique, judiciaire et pénitentiaire par l’examen et la signature des projets de conventions d’entraide judiciaire en matière pénale, civile, commerciale et sociale et en matière d’extradition et de transfèrement de personnes condamnées.

Mariétou KOITE

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