Pr Cheick Amala Touré sur la relecture de la Charte des partis Politiques : «Revoir le nombre des partis politiques passera par un large consensus»

Doyen de la Faculté des sciences administratives et politiques de l’Université Kurukanfuga de Bamako (UK) et président de l’Association malienne de droit constitutionnel (AMDC), Pr Cheick Amala Touré se prononce sur la relecture de la Charte des partis politiques, notamment en ce qui concerne le point relatif à la limitation du nombre des partis politiques

Publié mercredi 16 avril 2025 à 07:37
Pr Cheick Amala Touré sur la relecture de la Charte des partis Politiques : «Revoir le nombre des partis politiques passera par un large consensus»


L’Essor : Après consultations des partis politiques et des organisations de la société civile, le gouvernement, lors du Conseil des ministres du 4 avril dernier, a fait une communication relative à la relecture de la  Loi n°05-047 du 18 août  2005 portant Charte des partis politiques. Quelles appréciations faites-vous de cette démarche des autorités de la Transition ?

Pr Cheick Amala Touré : Toute société est appelée à évoluer et à s’adapter aux grandes orientations et aux besoins changeant exprimés par les citoyens. À cet effet, nous en faisons appel à témoin, à juste titre, à l’ancien Premier ministre britannique, Wilson Churchill qui dit : «La démocratie est un mauvais système, mais elle est le moins mauvais de tous les systèmes.»  Évoqué il y a de cela plusieurs décennies, aujourd’hui, le Mali se trouve confronté aux dures réalités d’une transformation de son espace de gouvernance à travers une démocratie mieux adaptée aux aspirations telles que formulées pendant les différents foras que les autorités de la Transition ont organisés (ANR, DIM).

Il est loisible de faire la lecture des difficultés relevées à travers la pratique des deux dernières décennies, entre autres : la prolifération des partis politiques, le nomadisme politique, le faible encadrement du financement des partis politiques, la gestion patrimoniale des partis politiques. Au regard des défis et enjeux susmentionnés, nous voyons d’un très bon œil la nécessité de revisiter la charte qui encadre les formations politiques.

Cette réforme pourrait rapprocher davantage les citoyens et la classe politique en termes de confiance et vision. S’il est admis que les partis politiques constituent en soi une des institutions indispensables au jeu démocratique, alors, il serait nécessaire de préciser leur rôle et de créer les conditions idoines pour combler les aspirations du Peuple.

L’Essor : À l’issue de ces consultations, il est attendu une réduction du nombre des formations politiques comme l’ont recommandé les ANR et le DIM. Est-ce à dire que cela contribuera à la refondation de l’État tant souhaitée par les Maliens ?

Pr Cheick Amala Touré : Par rapport à la réduction du nombre des partis politiques pour certains et pour d’autres leur «suppression pure et simple», nous nous retrouvons devant deux volontés antagoniques exprimées par le peuple. De prime abord, nous écartons l’idée qui consiste à aller vers la suppression systématique des partis politiques en raison du choix du «multipartisme intégral» pour lequel le peuple a opté à travers la Constitution de 1992 et celle de 2023.

L’Essor : Cette réduction aura-t-elle des répercussions sur les conditions de création et de financement ?

Pr Cheick Amala Touré : En revanche, revoir le nombre des partis politiques est envisageable par le procédé d’une ingénierie qui obéirait à la Constitution dans sa lettre et dans son esprit. On peut l’obtenir par plusieurs schémas. Pour nous, elle passera par un large consensus qui implique la participation inclusive des partis politiques et de la société civile. Cette réforme gagnerait en efficacité à travers le plafonnement des fonds de campagne, le contrôle des sources de financement, un large maillage territorial, la gouvernance démocratique interne des partis politiques, la démonétisation de l’élection et l’idéologisation des partis politiques.

L’Essor : Pourquoi est-il important de prendre en compte les statuts de l’opposition et de son chef de file dans la future Charte ?

 Pr Cheick Amala Touré : S’agissant de la prise en compte du statut de l’opposition politique, nous estimons que son maintien peut être bénéfique dans le système partisan africain. Un des corolaires de notre démocratie est la crise électorale, il est fréquent que le parti politique qui perd l’élection présidentielle perde tout. À ce titre, l’intérêt d’un tel statut permet d’avoir un interlocuteur institutionnalisé en cas de crise de tout ordre. Ce mécanisme est de nature à apaiser le climat politique entre le parti majoritaire au pouvoir et l’opposition politique. Par ailleurs, nous estimons que ce statut contribue à conférer à l’opposition politique une garantie de sa participation constructive à la gouvernance et l’animation de la vie politique.

L’Essor : En quoi c’est nécessaire de mettre fin au nomadisme politique en cours de mandat au Mali ?

Pr Cheick Amala Touré : Nous estimons qu’il faut poursuivre les réformes politiques et institutionnelles énoncées dans les recommandations des Assises nationales de la refondation (ANR). Et une de ces réformes attendues est la relecture de la Charte des partis politiques. Ces réformes contribueront à renforcer notre système démocratique, mais à condition qu’elles soient inclusives.

Cette démarche implique la participation effective non seulement des partis politiques mais aussi de la société civile, dont le but est la recherche d’un large consensus sur les différentes réformes envisagées. Il faut rappeler que le consensus est admis comme un principe à valeur constitutionnelle. En guise de fin de mots, nous demeurons convaincus que : «Le bateau Mali peut fortement taguer mais ne chavira point». 

Propos recueillis

Namory KOUYATE

Lire aussi : Enfants et Médias : L’Unicef et l’Amap forment 17 enfants journalistes

Dans le cadre du projet «Enfants et médias», porté conjointement par l’Unicef et l’Agence malienne de presse et de publicité (Amap), l’Unicef a lancé, hier à son siège, la cérémonie d’investiture du Réseau des enfants journalistes..

Lire aussi : Koulikoro : L’héritage culturel au cœur de la semaine nationale de la réconciliation

Dans la salle de conférence du gouvernorat, le directeur de cabinet du gouverneur Mohammar A. Haïdara a procédé mardi dernier au lancement officiel de la 4è édition de la Semaine nationale de la réconciliation (Senare)..

Lire aussi : Gao : C’est parti pour la Semaine régionale de la biennale

En prélude de la Biennale artistique et culturelle Tombouctou 2025, la Semaine régionale de Gao ou phase régionale a démarré, lundi au Stade Kassé Keïta, sous la présidence du directeur de cabinet du gouverneur de la 7è circonscription administrative du Mali, Mamadou Diakité..

Lire aussi : États généraux sur la situation de la femme et de l’enfant : 470 recommandations formulées

Les campagnes de vulgarisation des lois favorables aux droits des femmes dans les langues locales et le renforcement des centres d’alphabétisation féminins et centres d’autopromotion figurent parmi les recommandations.

Lire aussi : Ingénierie de la formation : Le projet Fier II forme Les CDR

Durant cinq jours, environ 20 techniciens des Centres de ressources (CDR) venus des Régions de Kayes, Koulikoro, Sikasso et Ségou verront leurs capacités renforcées sur l’ingénierie de la formation. Ils seront dotés d’outils nécessaires pour concevoir des formations qui répondent aux bes.

Lire aussi : À l’heure du Mali : La «cuillère de la résistance»

Au Mali, les populations et l’Armée subissent une épreuve imposée: la guerre hybride. Depuis bientôt quinze ans, le pays s’adapte, dans la vie quotidienne comme dans les consciences. On ne cessera jamais de le dire : cette guerre n’est ni fortuite ni née du hasard..

Les articles de l'auteur

Coopération sino-malienne : À un niveau stratégique

Un an après la visite du Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta en Chine dans le cadre du Forum sur la coopération sino-africaine (Focac), coïncidant avec le 76è anniversaire de la fondation de l’Empire du Milieu, célébré le 15 septembre, les relations entre les deux pays, datant des premières heures de notre indépendance, continuent à se renforcer.

Par Namory KOUYATE


Publié mercredi 17 septembre 2025 à 12:48

Cinsere-FNR : Le rapport annuel 2024 remis au Chef de l’État

Il en résulte une tendance de réalisation de 387 recommandations sur 517, soit 74,85%. Le document déplore certaines lenteurs notamment dans la mise en œuvre des projets industriels, de reboisement et de barrage.

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 29 août 2025 à 08:41

Visite du Premier ministre burkinabè : Une séance de travail féconde pour la concrétisation de la vision des chefs d’État

Rimtalba Jean-Emmanuel Ouédraogo a fait le tour de quelques questions d’intérêt commun à nos deux pays et dans le cadre de la Confédération AES avec son homologue, le Général de division Abdoulaye Maïga, hier à la Primature. Les deux personnalités ont ensuite visité le Palais des pionniers.

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 22 août 2025 à 07:45

Arrivée du Premier ministre burkinabé au Mali : Un agenda très chargé

Lors de sa visite d’amitié et de travail, Rimtalba Jean Emmanuel Ouédraogo visitera des structures, participera au lancement des activités de la 2è édition du Camp de la brigade citoyenne du Mali. L’hôte de marque aura une séance de travail avec le gouvernement. Enfin, il sera reçu par le Président de la Transition, le Général d’armée Assimi Goïta.

Par Namory KOUYATE


Publié mercredi 20 août 2025 à 09:08

Visite du Premier ministre burkinabé au Mali : L'axe Bamako-Ouagadougou se renforce

L'avion transportant le Premier ministre du Burkina Faso, Jean Emmanuel Ouedrago a atterri ce mardi aux environs de 17h à l'aéroport international Président Modibo Keïta-Senou..

Par Namory KOUYATE


Publié mardi 19 août 2025 à 18:56

Présentation au Chef de l’État du rapport du SIGRH : Plus de 36.000 fonctionnaires manquent à l’appel

À ce jour, 122.166 agents ont été recensés sur un total de 158.317, soit près de 80% de l’objectif initial.

Par Namory KOUYATE


Publié lundi 18 août 2025 à 08:01

Rapport d'exécution du projet de SIGRH : Outil de maîtrise d'effectif et de salaire

Le processus de la mise en place du SIGRH a été inclusif et s’est étendu sur une période allant de mai 2022 à septembre 2024.

Par Namory KOUYATE


Publié vendredi 15 août 2025 à 19:39

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner