#Mali : Dr Bakabigny Keïta sur les rencontres entre le Premier ministre et la classe politique : «Il veut décrisper l’espace politique pour contribuer à la réussite du Dialogue inter-Maliens»

Le chef du gouvernement a récemment décidé de rencontres les acteurs politiques. Dans l’interview ci-dessous, l’enseignant-chercheur à l’École normale supérieure de Bamako se prononce, entre autres, sur les objectifs et les enjeux de ce dialogue politique, les défis pouvant entraver sa mise en œuvre. Aussi, Bakabigny Keïta a-t-il abordé les atouts pour la réussite de la mission de Dr Choguel Kokalla Maïga

Publié mardi 02 avril 2024 à 07:13
#Mali : Dr Bakabigny Keïta sur les rencontres entre le Premier ministre et la classe politique : «Il veut décrisper l’espace politique pour contribuer à la réussite du Dialogue inter-Maliens»

L’Essor : Quelle est l’opportunité de la reprise du dialogue politique ?

Bakabigny Keïta : Pour le Premier ministre, sa rencontre avec la classe politique marque la fin d’une phase de la Transition et le point de départ d’une autre. Pour lui, il était très difficile qu’il se comprenne avec certains partis politiques. Il y avait péril en la demeure. L’urgence de l’action voudrait que le gouvernement prenne ses responsabilités pour éteindre le feu. Il ne pouvait et ne devait pas s’offrir le luxe de chercher les raisons du mal et les responsabilités.

La phase qui vient de s’achever à consister à maîtriser le feu. Ce travail correspond à la réalisation des deux premiers des trois D (Défense, Diplomatie et Développement) à savoir la défense de l’intégrité territoriale du pays couplée au détricotage diplomatique consacrée par la reconquête des régions nord et centre.

Par ricochet, Kidal et ses environs sont devenus, dans une certaine mesure, la base arrière des groupes armés (rebelles et terroristes). Ce double travail de défense de l’intégrité du territoire national et de la quête de la souveraineté a atteint son point culminant le jour de la reprise de la ville de Kidal, le 14 novembre 2023. Au fait, c’est une phase marquée par un détricotage militaro-diplomatique qui s’est traduit par le départ des forces militaires, de la diplomatie françaises et européennes, la suspension de RFI ainsi que de France 24. S’y ajoutent le retrait de la Cedeao, de la Minusma et la création de l’Alliance des États du Sahel (AES) avec le Burkina Faso et le Niger.

À l’entame de son adresse à l par a classe politique, le chef de l’Administration générale a tenu à préciser que sa démarche ne vise nullement à redorer son blason. Il a reconnu que la rupture stratégique du dialogue politique opérée par le gouvernement pouvait pousser les acteurs politiques à se sentir négliger ou mépriser. Il a expliqué que c’est l’urgence et la complexité des actions menées au double front militaire et diplomatique qui n’ont pas laissé le temps de parler politique. Il estime maintenant que le feu est maîtrisé à hauteur de souhait, l’autre phase de la Transition peut s’ouvrir, celle du dialogue politique.

Pour lui, il est possible de faire la guerre avec une équipe restreinte, mais pour vaincre définitivement et durablement la guerre, il faut l’implication de tous les fils et filles du pays. L’objectif de l’initiative du Premier ministre, en mettant en place des rencontres avec les responsables politiques de notre pays, est une invitation de la classe politique à s’impliquer dans le Dialogue inter-Maliens pour relever ensemble le défi de paix, de souveraineté et du développement.

 

L’Essor : En quoi cette démarche du Dr Choguel Kokalla Maïga est-elle salutaire ?

Bakabigny Keïta : Pour les détracteurs, le chef du gouvernement en tendant sa main à la classe politique cherche à redorer son blason surtout à un moment où, il fait face à une autre dissidence au sein du M5-RFP. Cependant, en toute objectivité, il convient de noter qu’en décidant de rencontrer les chefs de parti politique, le Premier ministre se propose de rouvrir le dialogue politique après des succès militaires et diplomatiques de son gouvernement. Il veut décrisper l’espace politique national pour contribuer à la réussite du Dialogue inter-Maliens, initié par le président de la Transition. Si les partis politiques acceptent la main tendue du chef du gouvernement, ils auront à gagner plus de crédibilité dans l’opinion, dans le cas échéant, ils ne feront qu’attiser la haine de la rue.

 

L’Essor : Quels peuvent être les enjeux de sa rencontre avec la classe politique ?

Bakabigny Keïta : Il est évident que la démarche de Choguel Kokalla Maïga n’est pas sans enjeu politique. Pour des adversaires, il travaille à sauver son fauteuil. Pirs encore, ils estiment que sa démarche est au service de sa propre candidature. Mais en vérité, le souci fondamental du Premier ministre est d’apaiser le climat politique en vue de la poursuite du programme politique de la Transition. Pour arriver à un tel résultat, il faut travailler à décrisper l’espace politique intérieur. Une telle action nécessite un dialogue franc et constructif avec toute la classe politique.

Par ailleurs, la démarche du chef du gouvernement œuvre à la réhabilitation de la classe politique. Pour lui, il est possible que l’élite dirigeante libère le pays par les armes sans forcément avoir besoin de toute la classe politique. Cependant, il trouve que pour développer le pays, il est nécessaire de faire participer toutes les forces vives de la nation en général et la classe politique en particulier.

Toutefois, il est clair que les élections sont en jeu dans la démarche du chef de gouvernement. C’est aussi un appel à la classe politique en vue de la préservation des acquis de la Transition. Donc au cœur du souci du Premier ministre, il y a incontestablement la préoccupation de la continuité de la ligne politique des autorités de la Transition.

L’on peut comprendre la démarche du chef du gouvernement comme une invitation de la classe politique à venir se joindre aux autorités à bien sortir de la Transition à travers la préservation des acquis et donc de la continuité.

C’est également une façon pour lui d’informer la classe politique, après des succès dans la réalisation de deux des trois «D» que le temps est venu de passer à la phase du troisième des trois «D», celui du Développement économique et social du pays. Cela ne saurait se réaliser sans une pacification de l’espace politique intérieur à travers l’organisation des compétitions électorales inclusives, transparentes, apaisées et crédibles. 

 

L’Essor : Les efforts de pacification de l’espace politique sont-ils enclenchés ?

Bakabigny Keïta : L’initiative de Dr Choguel Kokalla Maïga est salutaire. Cependant, elle risque de se heurter à la résistance d’une partie de la classe politique accusée à raison ou à tort dans l’opinion publique de s’être rendue responsable de la faillite de l’État. Une faillite traduite par la situation sécuritaire catastrophique, la mauvaise gouvernance née de la corruption et de l’impunité. Il s’agit surtout des partis politiques qui ont porté le Mouvement démocratique. Ces partis politiques pourront mobiliser contre les effets de la crise économique aux origines lointaines, multiples et variées.

 

L’Essor : Les atouts du chef du gouvernement sont-ils énormes pour réussir à décrisper le front politique ? 

Bakabigny Keïta : Il peut compter sur la confiance du chef de l’État, le colonel Assimi Goïta. Aussi, il peut compter sur sa gouvernance de ces trois dernières années sanctionnée par des succès militaires et diplomatiques. Ce qui lui a permis d’acquérir une assise populaire très importante.

Par ailleurs, pour réussir à décrisper, les autorités de la Transition doivent saisir le Dialogue inter-Maliens comme une occasion pour aller, sans complaisance, à remanier le gouvernement de sorte à fédérer les forces politiques et sociales patriotiques capables de conduire le pays à la stabilité politique et institutionnelle en vue de la préservation des acquis de la Transition. Une telle mesure politique curative doit s’appliquer à l’ensemble de l’administration et institutions de la République. Elle doit s’appliquer surtout au Conseil national de Transition pour le rendre plus inclusif parce que plus représentatif des différentes populations de notre pays.  

Propos recueillis par

Namory KOUYATE

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