Floraison de partis politiques au Mali : Signe de vitalité démocratique ?

Assurément, le multipartisme, bien qu’outil indispensable des libertés politiques, n’est pas sans avoir un revers de la médaille. La face moins attractive de la médaille est un désordre général, dans lequel on assiste à la naissance de ce que les mauvaises langues qualifient de partis lilliputiens, et qui du reste, n’apportent aucun avantage significatif dans l’animation de la vie politique

Publié vendredi 07 avril 2023 à 05:49
Floraison de partis politiques au Mali : Signe de vitalité démocratique ?


Pendant la période coloniale, la vie politique au Soudan français (actuel Mali) a été marquée par une bipolarisation,  mettant  en présence deux forces politiques rivales qui se livraient une concurrence sans merci pour la conquête et l’exercice du pouvoir. à cette époque-là, le champ politique était essentiellement dominé par le Parti progressiste soudanais (PSP) de Fily Dabo Sissoko créé le 13 février 1946, et  l’Union soudanaise pour le rassemblement démocratique africain  (US-RDA) de Mamadou Konaté, fondé le 22 janvier 1946. 

De 1946-1960, le pays a connu une vie politique d’une très grande intensité. Ces deux partis, de par leur solide implantation sur l’ensemble du territoire national, et de l’engagement politique fort et sans faille de leurs militants, ne laissaient aucune chance à d’autres formations de survivre dans les flots tumultueux du marigot politique soudanais.

L’indépendance acquise, la première République (1960-1968)  a connu  un  parti unique de fait, d’obédience socialiste dénommé Union soudanaise pour le rassemblement démocratique africain (US-RDA). La deuxième République (1968-1991) a vu la naissance de l’Union démocratique du peuple malien (UDPM)  en 1976, un autre parti unique de fait qui a régné jusqu’au coup d’État militaire le 26 mars 1991.

La troisième République (1991, à date d’aujourd’hui), a favorisé la libéralisation de l’espace démocratique conduisant à l’explosion du paysage politique malien et à l’existence d’une kyrielle de formations politiques qui croissent à une vitesse vertigineuse,  on eût dit des fourmis dans la maison.

Après 30 années de monopartisme, l’ère du multipartisme s’ouvre suite au vent dit de l’Est, qui a soufflé en Afrique emportant sur son passage les régimes totalitaires monopartites dans un tourbillon cauchemardesque. On comprend alors aisément, pourquoi les Maliens ont fait le choix du multipartisme intégral consacré dans l’ordonnance n° 91-075/PCTSP du 10 octobre 1991 et la loi n° 05-047/du 18 août 2005 portant Charte des partis politiques.

Du reste, il n’y avait pas d’autres alternatives à l’option multipartisme intégral. Aucun obstacle, ne pouvait arrêter la folle envie d’étancher la soif de liberté démocratique, d’un peuple longtemps sevré du droit élémentaire de s’associer et de créer des partis politiques. L’ivresse de la victoire de mars 1991 passée, il est donc temps de s’interroger, de porter un regard périodique sur le dynamisme de notre démocratie multipartite.

En 2022, l’État du Mali comptait environ 281 partis politiques régulièrement inscrits au ministère de l’Administration territoriale, pour une population estimée à 21.904.983 habitants, qui animent l’espace politique. Ce chiffre connaîtra sans nul doute, une augmentation  non négligeable à l’approche des échéances électorales prochaines déjà annoncées. La facilité avec laquelle les partis politiques sont créés, comme des sociétés commerciales, laisse à croire qu’on pourrait allègrement atteindre, voire dépasser la barre de 300 partis dans un proche avenir, si des mesures ne sont pas prises pour limiter leur inflation qui fait désordre.

Parlons peu, mais parlons bien. Les partis au Mali ont une vision d’ensemble en partage qui constitue le socle de leur projet sociétal : valeurs de solidarité, de tolérance, intégrité, respect des droits fondamentaux de l’Homme, développement économique, social, culturel ou autres.

Si tant est que tous les projets de société des partis, aspirent à l’édification d’un Mali démocratique, fort et prospère, ceux idéologiquement proches ne peuvent-ils pas se regrouper, et former des ensembles politiques plus vastes et plus opérationnels ? Ce faisant, leurs capacités en ressources humaines seront renforcées, et  leurs activités intensifiées aux niveaux local et national. En outre, ils bénéficieront des financements publics suffisants en considération des votes obtenus.

Il ne fait pas de doute, l’existence de plusieurs partis est une condition sine qua non à la démocratisation, à la liberté des citoyens d’adhérer aux formations politiques de leur choix. Il est aussi vrai d’affirmer, que le niveau de démocratie ne se mesure point par le nombre pléthorique de partis politiques, qui au fait, n’exprime pas  forcement la vitalité  démocratique d’une nation. Assurément, le multipartisme, bien qu’outil indispensable des libertés politiques, n’est pas sans avoir un revers de la médaille.

La face moins attractive de la médaille, est un désordre général, dans lequel on assiste à la naissance de ce que les mauvaises langues qualifient de partis lilliputiens, et qui du reste, n’apportent aucun avantage significatif  dans l’animation de la vie politique. Bien au contraire, ils affaiblissent, banalisent et  décrédibilisent les véritables formations politiques qui comptent, et qui promeuvent la formation politique et civique de leurs militants.

L’élection, comme toutes les autres formes de citoyenneté, est un excellent baromètre politique, qui sert à évaluer la vigueur, le dynamisme de la vie politique de la cité. Par  conséquent, une participation massive  aux élections, est un besoin vital pour la démocratie, et un signe de bonne santé démocratique. Elle atteste de la maturité politique des citoyens. Hélas, le taux de participation, malgré la pléthore de partis, reste très faible depuis 1991 (moins de 28% aux présidentielles de 2018). De toute évidence, entre les votants et la classe politique, c’est le désamour.


La démobilisation quasi permanente de l’électorat, exprime l’état d’âme des électeurs, qui ne font plus confiance à leurs représentants. Cette méfiance, cette défiance des votants vis-à-vis de la classe politique, est profondément troublante. L’abstention électorale, sans être signe d’immaturité politique,  est manifestement un déficit démocratique.  Assurément, la vitalité démocratique dépend exclusivement des partis politiques actifs, qui assument pleinement leur fonction.

Macki SAMAKÉ

Professeur à la retraite

Ancien recteur

Rédaction Lessor

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