
L’approvisionnement correct de notre pays en produits de première nécessité est l’une des priorités des autorités de la Transition depuis que la Communauté économique des États de l’Afrique de l’Ouest (Cedeao) et l’Union économique et monétaire ouest africaine (Uemoa) ont décidé de placer le Mali sous embargo économique et financier avec à la clé la fermeture des frontières avec les pays voisins. Pour relever ce défi, le gouvernement a pensé recourir au port de Conakry en Guinée qui est d’ailleurs le plus proche de Bamako.
Pour la mise en oeuvre rapide de ce projet, le ministre des Affaires étrangères et de la Coopération internationale, Abdoulaye Diop, a conduit hier à Conakry (Guinée), une forte délégation comprenant le ministre de l’Administration territoriale et de la Décentralisation, porte-parole du gouvernement, le colonel Abdoulaye Maïga, le ministre de l’Économie et des Finances, Alousséni Sanou, le ministre des Transports et des Infrastructures, Mme Dembélé Madina Sissoko et celui des Mines, de l’Énergie et de l’Eau, Lamine Seydou Traoré. Des membres du Conseil national de la Transition, des opérateurs économiques dont le président de la Chambre de commerce et d’Industrie du Mali (CCIM), Youssouf Bathily, font également partie de la délégation dépêchée par le chef de l’État, le colonel Assimi Goïta.
L’objectif de la mission est de témoigner la reconnaissance des autorités et du peuple maliens au président de la Transition de la République de Guinée pour avoir refusé de fermer ses frontières avec le Mali conformément aux décisions prises par les dirigeants de la Cedeao et de l’Uemoa. L’occasion a été mise à profit pour explorer les voies et moyens devant permettre d’assurer l’approvisionnement correct et régulier du marché malien en denrées de première nécessité et autres produits à partir du port de Conakry. Cela, en vue de faire face aux sanctions imposées au peuple malien par la Cedeao et l’Uemoa lors de leurs sessions extraordinaires tenues le 9 janvier dernier à Accra (Ghana).
En clair, il s’agit de prendre des mesures immédiates et pratiques pour convoyer les marchandises maliennes déjà disponibles au niveau de ce pays. Et de créer les conditions nécessaires pour accueillir les cargaisons et les navires qui sont orientés vers le port de Conakry afin d’assurer l’approvisionnement correct et diligent du marché national.
C’est dans cette perspective que la délégation malienne a été reçue avec tous les honneurs, à son arrivée au Palais Mohamed V, par le président de la Transition, le colonel Mamadi Doumbouya. Le dirigeant guinéen s’est dit très heureux d’accueillir ses hôtes du Mali, qui avec la Guinée, ne font qu’un seul. «Nous assumons notre amitié et notre fraternité avec le Mali quelles que soient les conséquences. Je vous demande de vous mettre à disposition pour identifier les voies et moyens pour satisfaire la demande malienne et enlever les difficultés à cet effet», a déclaré le président de la Transition guinéenne, avant de se retirer de la salle. Auparavant, il avait fait observer une minute de silence à la mémoire de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta, décédé le dimanche 16 janvier à Bamako.
60 VOIRE 70% VERS LA GUINÉE- La séance de travail tenue à huis clos a permis aux deux délégations d’explorer les voies et moyens nécessaires pour ravitailler le Mali à partir du port de Guinée. Pour davantage cerner leurs sujets, des comités restreints ont été formés selon les domaines d’intervention des membres des deux délégations. Au finish, on peut dire que les échanges ont été visiblement à la hauteur des attentes, à en croire le président de la Chambre de commerce et d’industrie du Mali. «Les autorités guinéennes étaient pressées de nous accueillir. Elles ont exprimé leur entière disponibilité à nous accompagner dans ce processus à court, moyen et long termes, notamment en matière d’infrastructures structurantes pour multiplier les corridors d’approvisionnement.
Le seul qui existe est celui reliant Bamako-Conakry en passant par Siguiri-Kanka-Kouremalé. Si toutes les infrastructures en projet : routes, chemin de fer, dépôt de stockage d’hydrocarbures, grands magasins de stockage de produits de premières nécessité, des entrepôts… sont réalisés, le trafic malien pourrait basculer à 60 voire 70% vers la Guinée. C’est la capitale la plus proche et la plus viable économiquement pour nous hommes d’affaires», a indiqué Youssouf Bathily, rappelant que 70% de nos marchandises passent actuellement par le port de Dakar, 20% par Abidjan. Les ports de Conakry, Accra au Ghana et Lomé au Togo se partagent les 10% restants, a ajouté le président de la CCIM. Juste après la séance de travail, les deux délégations ont visité le port de Conakry notamment la partie où se trouvent les conteneurs. La partie malienne a eu droit à des explications sur les capacités d’accueil du port et la célérité quand à l’évacuation des marchandises qui y transitent.
Les autorités portuaires guinéennes ont assuré de leur capacité à satisfaire les besoins maliens. Cela, malgré l’urgence et la forte demande. Elles ont par exemple expliqué que le port à conteneurs a une capacité de stockage de plus de 1.600 conteneurs vides. Une surface de 30 hectares est concédée au port à 30 km de la ville pour le dépotage. L’interconnexion douanière, en vigueur dans la Cedeao, n’est pas encore effective du côté de la Guinée, selon la direction des douanes en place au niveau du port. La mise à niveau prendra moins de trois mois, ont assuré les responsables portuaires.
À son arrivée à l’aéroport international de Conakry, la délégation malienne avait été accueillie par le chef d’état-major général des armées guinéennes, le colonel Sadiba Coulibaly et l’ensemble des membres du Comité national du rassemblement pour le développement (CNRD). «Nous avons été accueillis avec joie et honneur par le CNRD. Cela n’est guère une surprise au regard de la qualité des relations qui lient nos deux pays. Aujourd’hui, nous ne pouvons être qu’heureux et fiers que la Guinée ait décidé de ne pas fermer ses frontières avec le Mali en ces moments difficiles de notre histoire», a témoigné le chef de la diplomatie malienne, en réponse aux mots de bienvenue du chef d’état-major général des armées de la Guinée.
Auparavant, le colonel Sadiba Coulibaly a présenté les condoléances du peuple guinéen à la délégation et au peuple maliens suite au décès de l’ancien président Ibrahim Boubacar Keïta. Qui, selon l’officier supérieur, avait refusé de fermer les frontières maliennes à la Guinée lorsque ce pays frère faisait face à l’épidémie Ebola.
Après Conakry, la délégation conduite par le ministre Abdoulaye Diop s’est envolée pour Nouakchott, en Mauritanie. Elle rencontrera ce mardi le président Mohamed Ould Cheikh El Ghazouani à qui elle remettra les conclusions des Assises nationales de la refondation (ANR) et le message d’amitié et de fraternité de son homologue malien, le colonel Assimi Goïta.
Envoyé spécial
Cheick M. TRAORÉ
Cheick Moctar TRAORE
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