Environnement : «Joliba» en danger

Long de 4.184 kilomètres, le fleuve Niger subit toutes sortes d’agressions. Les principaux pollueurs sont les riverains et les chercheurs d’or

Publié jeudi 20 février 2025 à 07:34
Environnement : «Joliba» en danger

 Le phénomène est causé par les eaux de ruissellement en provenance des collines et des rivières des quartiers aux alentours

 

 

L’état dégradant du pan du fleuve Niger où «Joliba», qui traverse la ville de Bamako, inspire la peur de voir ce cours d’eau, long de 4.184 kilomètres (km), disparaître. À Djicoroni Para, en Commune IV, l’eau du fleuve affiche une couleur jaunâtre. Elle tarit à grande vitesse laissant des périmètres propices pour le maraîchage. C’est le même constat amer au niveau de «Woyowayanko», du pont des Martyrs, de la Place du cinquantenaire. Les amas d’ordures dans le fleuve en rajoutent à l’amertume.

Fatima est nostalgique du temps où ses amies et elle allaient s’approvisionner en eau au fleuve Niger pour les besoins de la famille. La native de Djicoroni Para dont le domicile paternel est riverain du fleuve, est tracassée de voir le fleuve ainsi dégradé. «L’eau du fleuve nous servait de boisson, pour le besoin de la cuisine et la lessive. Elle était tellement claire et limpide qu’on voyait les matières au dessous d’elle», témoigne notre interlocutrice. Son jeune frère renchérit qu’ils pouvaient observer le mouvement des poissons dans l’eau étant sur un rocher.

Nombreuses sont les personnes qui s’inquiètent du sort du troisième grand fleuve de l’Afrique. Abdoulaye Traoré alias Capitaine habite à «Gningnin carré», un secteur de Djicoroni para. Le riverain considère les caniveaux et autres collecteurs comme les premières sources du malheur de ce cours d’eau.  Très soucieux de l’avenir du voisin qu’est le fleuve Niger, il passe de temps en temps sur les lieux pour enregistrer des vidéos de sensibilisation sur les dangers que court le fleuve. Ils partagent ces messages sur les réseaux sociaux. Capitaine estime que l’ensablement est provoqué par les eaux de ruissellement en provenance des collines et des rivières des quartiers d’alentours. Il accuse des familles de déverser leurs déchets  dans le fleuve. Certains à travers  des caniveaux pendant la nuit.

Abdoulaye Traoré invite les autorités à s’impliquer fortement dans la protection du Joliba. Cela, dit-il, passe par des sanctions sévères contre les ennemis du fleuve. Sinon, insiste-t-il, le fleuve disparaît à grand pas. Par ailleurs, il attire l’attention sur les conséquences liées à l’ensablement du fleuve. Capitaine cite l’inondation dont les riverains sont les premières victimes. «Ce que nous avons vu et vécu cet hivernage est un exemple et un signal fort», laisse entendre Abdoulaye Traoré.

Action humaine- Ce dimanche 2 février 2025 à 18 heures, Madou Famanta, pêcheur de son état à DjicoroniPara, accoste sa pirogue à un lourd objet. En face de lui, un gros tas de sable couvert de vieux vêtements, des plastiques et des vieilles boîtes de conserve. Le pêcheur regrette que les autorités n’accordent pas d’importance à leur opinion face à la déliquescence du fleuve. Selon lui, ni la population ni les autorités ne se soucient de ce fleuve.

C’est parce qu’il y a un manque de volonté, soutient-il, que ce cours d’eau est dans cette situation. Et de poursuivre que l’ensablement continuera tant qu’il y a de fortes pluies qui provoquent des torrents. Madou Famanta conseille de mettre fin aux comportements comme celui visant à remplir les caniveaux d’ordures.  Il accuse les orpailleurs opérant dans le Mandé d’être responsables de l’impureté de l’eau. En outre, il pense que si ce fleuve est bien protégé, il peut renforcer notre économie à travers la mise en place d’un projet de navigation entre Bamako et la République de Guinée.

L’Agence du bassin du fleuve Niger (ABFN) a pour mission de sauvegarder le fleuve Niger et ses bassins. L’ingénieur des eaux et forêts au département protection et gestion des écosystèmes à l’ABFN, Kalifa Traoré explique que l’ensablement est le transport du sable et des sédiments d’un lieu à un autre et leur accumulation. Bien qu’il soit naturel, il est accéléré et aggravé par l’action humaine. Ça se manifeste par la formation de petits ilots de sable dans les cours d’eaux.

L’environnementaliste indique que ces principaux impacts sur l’écologie du fleuve sont des modifications de l’habitat, de la faune aquatique, la répercussion sur la reproduction de ces animaux et d’autres organismes aquatiques, la navigation difficile à des endroits. À cela s’ajoutent, l’impact sur les économies liées au fleuve, la dégradation des berges et des infrastructures, le remplissage du lit, la provocation des inondations et l’affectation de l’irrigation.

Il souligne que l’ABFN fait le suivi environnemental à travers une cellule appelée Observatoire. Kalifa Traoré note que les moyens de s’enquérir de la situation sont les images satellitaires, un système d’information géographique permettant à la cellule d’avoir des informations sur l’écologie et de faire son suivi environnemental. Et de confirmer que l’ensablement du fleuve est bien constaté au niveau de sa structure. D’ailleurs, des interventions d’essai de curage du lit du fleuve dans le cadre du Projet de réhabilitation économique et environnemental du fleuve Niger ont été faites. Cela consistait, explique-t-il, à faire le dragage (curage) sur le fleuve entre Macina et Diafarabé (Région de Mopti).

 Cette phase de démonstration a montré qu’il est possible de continuer à curer le passage de l’eau, même si c’est financièrement costaud. «Nous faisons aussi des aménagements de berges pour les solidifier et les végétaliser, affirme-t-il. Nous allons mettre beaucoup plus l’accent sur la sensibilisation des populations qui sont des acteurs d’aggravation de la situation. Sinon les sanctions ne relèvent pas de notre compétence. S’il y a des cas de dénonciations, nous faisons le rapport pour l’envoyer à qui de droit».

En somme, le fleuve bien aménagé au cœur de la ville, au-delà de ses atouts économiques, contribue à en faire une ville vitrine. Mais pour le nôtre, c’est le paradoxe qui se produit. Conservons le pour le bien-être de tous, car il est l’une des premières sources de vie de la nation. 

N'Famoro KEITA

Lire aussi : Œuvres sociales: Le Président de la Transition offre des vivres et moyens roulants aux personnes atteintes de la lèpre

Dans le cadre de la commémoration de la Journée internationale des personnes handicapées, le Président de la Transition, le Général d'armée Assimi Goïta a remis, ce vendredi 5 décembre, un important kit alimentaire ainsi que des moyens roulants aux personnes atteintes de la lèpre.

Lire aussi : Guerre informationnelle : Le ministre de la Communication salue la Maison de la presse pour ses efforts

Dans un communiqué rendu public ce vendredi 5 décembre 2025, le ministre de la Communication, de l'Économie numérique et de la Modernisation de l'Administration a adressé ses félicitations et remerciements au président de la Maison de la presse.

Lire aussi : Élimination des violences à l’égard de la femme : Des avancées mais des défis

À l’instar de la communauté internationale, notre pays a commémoré la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes. Le clou a été une conférence-débat organisée, hier au siège de la Coordination des associations et ONG féminines (Cafo)..

Lire aussi : 2è Conférence mondiale sur l’exploitation des données pour améliorer la mesure de la corruption : Le Mali expose ses réalisations

Notre pays a participé à la 2è Conférence mondiale sur l’exploitation des données pour améliorer la mesure de la corruption qui s’est tenue du 2 au 4 décembre au siège des Nations unies à New-York. La délégation malienne était conduite par le secrétaire général du ministère de la.

Lire aussi : Violences psychologiques : Les tourments d'une victime

Les activités de la campagne intitulée : «16 jours d'activisme contre les Violences basées sur le genre (VBG)» battent leur plein. Dans ce cadre, une victime de violences psychologiques a accepté de se confier sous anonymat. L'habitante de la Commune I du District de Bamako dit avoir été aba.

Lire aussi : Audiovisuel : Les virtuoses qui font la fierté de l’Ortm

Mme Bintou Ouédraogo Dembélé et Mme Ouédraogo Rokia Traoré ont su tracer avec abnégation leur sillon dans le métier du son, essentiellement dominé par la gent masculine.

Les articles de l'auteur

Pêche à la ligne : Un passe-temps à Bamako

Au-delà du loisir de pêcher, ce hobby permet à des férus de l’activité de deviser tranquillement sur les berges du fleuve Niger et de profiter des effluves de la brise de terre nocturne.

Par N'Famoro KEITA


Publié jeudi 30 octobre 2025 à 07:56

Éradication de la rage : La nécessaire implication de toute la communauté

En 2024, les services vétérinaires ont recensé 1.385 personnes mordues par 16 animaux de différentes espèces dans notre pays.

Par N'Famoro KEITA


Publié mercredi 01 octobre 2025 à 09:05

Spécial 22 septembre 2025, Renforcement du mix énergétique : Les trois projets majeurs du président Goïta

Il s’agit des centrales solaires de Sanankoroba, Safo et Tiakadougou-Dialakoro pour une capacité totale de 400 mégawatt (MW). Les travaux ont été lancés en 2024 par le Président de la Transition, le Général d’Armée Assimi Goïta.

Par N'Famoro KEITA


Publié vendredi 19 septembre 2025 à 21:56

Santé des végétaux : L’OPV évalue les capacités phytosanitaires du Mali

La santé des végétaux est un enjeu mondial majeurL’Office de protection des végétaux (OPV) a organisé, hier dans ses locaux, le 2è atelier d’évaluation des capacités phytosanitaires du Mali..

Par N'Famoro KEITA


Publié mardi 09 septembre 2025 à 08:22

Convention groupée de la zone 4 de la JCI Mali : Pour l’excellence et le leadership

Placée sous le thème : « Jeunesse engagée : apprendre et innover pour relever les défis de l’employabilité des jeunes du Mali », la 16ᵉ convention groupée de la zone 4 (Z4) de la Jeune Chambre Internationale (JCI) du Mali s’est tenue samedi dernier, au Centre de formation des collectivités territoriales..

Par N'Famoro KEITA


Publié mardi 26 août 2025 à 09:53

Sébénikoro : Elle se défenestre à la suite d’un différend avec son époux

Les disputes du couple sont choses courantes dans nombre de foyers. Cependant, ces histoires sortent de l’ordinaire lorsque la femme totalement hors d’elle-même décide de mettre fin à ses jours. Pourtant, c’est une scène dramatique du genre auquel les habitants de Dramanebougou, un des secteurs de Sébénicoro, quartier populaire de la Commune IV du District de Bamako, ont vécu la semaine dernière..

Par N'Famoro KEITA


Publié jeudi 31 juillet 2025 à 12:08

Sotrama : De la gloire à la décadence ?

Ces minibus tirent leur nom d’une société de transport dont l’ambition s’est noyée dans un flot de cafouillages. Aujourd’hui, les acteurs prônent une reprise en main du secteur.

Par N'Famoro KEITA


Publié mercredi 30 juillet 2025 à 10:18

L’espace des contributions est réservé aux abonnés.
Abonnez-vous pour accéder à cet espace d’échange et contribuer à la discussion.
S’abonner