Colonel-major à la retraite Ousmane Edmond Korongo à propos des nouveaux généraux de l’Armée : «C’est une récompense bien méritée»

Dans cette interview, le colonel-major à la retraite Ousmane Edmond Korongo revient sur la promotion du président de la Transition Assimi Goïta et de ses compagnons du 18 août 2020 au grade de général. L’ancien officier supérieur explique également comment on accède aux grades supérieurs dans l’Armée et se prononce sur la montée en puissance des Forces armées maliennes

Publié jeudi 24 octobre 2024 à 21:07
Colonel-major à la retraite Ousmane Edmond Korongo à propos des nouveaux généraux de l’Armée : «C’est une récompense bien méritée»


L’Essor : Le président de la Transition et plusieurs officiers supérieurs viennent d’être promus au grade de général. En tant qu’officier supérieur à la retraite, quel est votre sentiment après cette promotion ?

Ousmane Edmond Korongo : Le Mali est revenu de loin. Nous avons eu une période sombre de notre histoire où des soldats maliens ont fui du Nord jusqu’au Sud, suite à la trahison de beaucoup de personnes. Le Mali a fait appel à la France, à la Minusma et à plusieurs partenaires. Cela n’a pas permis d’éradiquer le terrorisme. Au contraire, la Minusma et la France ont été des éléments qui ont enfoncé le Mali dans cette période dure. Nous avons fait appel à l’EUTM pour former les soldats maliens, malheureusement cette formation était au rabais. Elle a détruit la formation initiale malienne.

La Loi de programmation militaire a permis de payer des armes vétustes pour faire face à ce mal. Des véhicules ont été payés ainsi que des avions qui ont été toujours cloués au sol. Pour voler, il faillait demander l’accord de la France. Cette période douloureuse est passée. Des jeunes, dignes fils du Mali, ayant combattu au Nord, se sont levés comme un seul homme pour mettre fin à cette situation. Mais aussi pour rendre au Mali son indépendance.

Grâce à ces jeunes officiers en l’occurrence Assimi Goïta, Ismaël Wagué, Malick Diaw, Sadio Camara et Modibo Koné, notre pays a recouvré sa souveraineté. Avec l’appui du peuple, ils ont osé et gagné. Ils ont d’abord renvoyé la force Barkhane et l’ambassadeur de France qui étaient des complices. Donc, ces officiers, ayant vu tout cela, ont renvoyé ceux-ci et ont choisi un nouveau partenaire qui est la Russie qui nous a dotés en armes dont on a besoin. C’est grâce à ces armes qu’on fait face au terrorisme.

Donc, ces officiers qui ont risqué leur vie, ces patriotes qui se sont mis debout pour libérer notre pays, méritent cette promotion. Cette récompense provient du Dialogue inter-Maliens dont l’une des recommandations phares a été de les nommer au grade de général. C’est une récompense, parce que ce sont des gens qui ont libéré le Mali. C’est pour cette raison que nous, en tant qu’anciens militaires et leur papa, nous leur tirons le chapeau. Nous leur disons merci pour ce courage. C’est une récompense bien méritée.

L’Essor : De façon générale, comment accède-t-on aux grades supérieurs dans l’Armée ?

Ousmane Edmond Korongo : Dans l’Armée, le premier grade est le soldat et le dernier grade est le général. On peut accéder au grade de général par nomination ou par avancement normal, c’est-à-dire du soldat jusqu’au général en passant par le colonel et le colonel-major.

L’Essor : Quelle est la différence entre un général de brigade, un général de division, un général de corps d’Armée et un général d’Armée ?

Ousmane Edmond Korongo : D’abord, le général de brigade arbore deux étoiles. Il commande plusieurs régiments donc la brigade, même si chez nous, l’Armée n’est pas constituée en brigade et en division. Secundo, le général de division porte trois étoiles et commande une division. Quant au général de corps d’Armée, il arbore quatre étoiles. Le corps d’armée est constitué de plusieurs divisions. Et le Général d’armée a cinq étoiles, c’est le dernier rang des généraux. C’est l’étoile qui est au-dessus de toutes les autres.

C’est pour dire que le grade consacre l’attitude à commander, à exercer la souveraineté, à assumer la responsabilité et en même temps à exercer la fonction. Chaque grade correspond à une fonction bien déterminée dans l’Armée. Mais cela ne veut pas dire que lorsqu’on est Général de corps d’armée et Général d’armée, on doit commander une unité. En d’autres termes, ils ne vont pas venir commander dans l’Armée, il y a déjà le chef d’état-major général des Armées qui joue ce rôle.


L’Essor : De la création de l’Armée en 1961 à cette année, seulement trois officiers supérieurs ont obtenu le grade de général d’Armée à savoir feu Moussa Traoré, feu Amadou Toumani Touré et Assimi Goïta. Y-a-t-il une explication ?

Ousmane Edmond Korongo : L’explication est qu’Assimi Goïta est le président de la Transition et chef suprême des Armées. Et le chef suprême des Armées doit avoir le grade le plus élevé. C’est le Général d’armée qui est au-dessus de tous les généraux. Moussa Traoré était le président de la République de même qu’Amadou Toumani Touré. C’est pour cette raison qu’ils ont été élevés au grade de Général d’armée.

L’Essor : Les nouveaux généraux promus, avec à leur tête le Général d’armée Assimi Goïta font face à la guerre asymétrique notamment celle contre le terrorisme imposée à notre pays. Cela représente quoi pour un militaire ?

Ousmane Edmond Korongo : Ce sont des officiers qui ont d’abord combattu au Nord. Depuis sous-lieutenants et capitaines, ils ont été au front. Ils ont su faire la guerre classique et celle asymétrique. De la guerre classique, on est rentré dans celle asymétrique qui est plus compliquée. Parce que dans la guerre asymétrique, l’ennemi est partout et nulle part. À n’importe quel moment, on peut tomber dans une embuscade ou sauter sur une mine, un engin explosif improvisé. C’est un ennemi invisible qu’il faut avoir le courage de combattre.

Alors que dans la guerre classique, l’ennemi, à partir de cinq kilomètres, on le voit. Ce sont des officiers qui ont connu et ce combat classique et ce combat asymétrique. Ils ont eu beaucoup d’expériences auprès des anciens. Par exemple, le président Assimi Goïta était à Sofara où il a duré. Ses unités sont intervenus partout à l’intérieur du pays, notamment à Boulkessi. Sofara est la localité où était basé le bataillon des forces spéciales dont le président Assimi Goïta était le chef.

L’Essor : Quel regard portez-vous sur cette guerre contre le terrorisme avec les succès enregistrés à Kidal, Ber et d’autres localités et quel espoir avez-vous pour la victoire finale des pays de l’AES contre cet ennemi d’une autre civilisation ?

Ousmane Edmond Korongo : D’abord, j’apprécie le courage de nos militaires. Le combat qu’ils mènent est compliqué et dangereux. C’est pour cela que le Général d’armée Assimi Goïta et ses camarades Généraux de corps d’armée ont choisi la Russie. La formation des hommes et l’acquisition des armes modernes nous ont permis de monter en puissance et d’engranger beaucoup de victoires. Le matériel n’est rien sans les hommes qui font la guerre.


Raison pour laquelle, la prise de Kidal illustre bien comment nos hommes ont été formés, lesquels ont bouté hors de cette ville nos ennemis. Ber également a été une illustration. Ils ne sont pas allés à pied, mais bien armés et équipés. Nous avons des moyens modernes sophistiqués par lesquels, on peut détecter l’ennemi à n’importe quel moment. L’Armée a des drones aujourd’hui que nous n’avons jamais connu à notre époque. Presque 40 ans de service, nous n’avons jamais eu un drone. Mais les drones sont devenus maintenant une arme de guerre.

C’est le mérite des officiers de la Transition. On ne peut enclencher une victoire sans équipements modernes. Les trois pays de l’AES ont pris leur destin en main pour former l’Alliance. C’est de bonne guerre, parce que nous vivons les mêmes problèmes, notamment le terrorisme. Et nous avons été maltraités de la même manière. C’est pour cela que les trois présidents de Transition ont choisi de créer l’AES pour faire face au terrorisme.

L’Essor : Un mot sur la montée en puissance de l’Armée malienne dans le contexte régional et international actuel ?

Ousmane Edmond Korongo : Nul ne peut parler de la montée en puissance sans parler de la formation des hommes et leur engagement ainsi que l’acquisition des moyens modernes. Nous avons des moyens modernes terrestres, des drones et hélicoptères de combat, des avions de dernière génération pour porter le coup fatal à l’ennemi partout où besoin sera. L’ennemi, partout où il est, ne se sent pas à l’abri et peut être neutralisé à n’importe quel moment. Parce que les moyens modernes nous permettent de le faire. On n’oublie pas que présentement nous avons des leaders. Cette montée en puissance ne peut se faire sans la population qui doit aider son Armée.

Il ne peut y avoir de victoires en cachant l’ennemi. Dénonçons-le partout où besoin sera. C’est ainsi que nous pouvons aider l’Armée à avoir la victoire. Nous vivons un contexte difficile marqué par la guerre asymétrique. On n’oublie pas que les Américains ont fui l’Afghanistan et le Vietnam tout comme les Soviétiques ont fui l’Afghanistan. C’est pour cela que le combat que nous menons n’est pas facile. Parce qu’il faut faire beaucoup attention et compter sur tout le monde, notamment l’Armée et son peuple. Sans cela, il n’y a pas de victoire.

L’Essor : Pour évoquer le Général d’armée Assimi Goïta et ses camarades, le Premier ministre les appelle «Monè bo dewn» (dignes fils en français). Qu’en pensez-vous ?

Ousmane Edmond Korongo : Ce sont nos enfants qui ont d’abord chassé la France, chose qui n’était jamais arrivée en Afrique. Chasser un ambassadeur français dans un délai de 72 heures n’était jamais arrivé en Afrique. On a démystifié ces gens (les français, ndlr). On a chassé aussi la Minusma, chose qui n’était jamais arrivée au monde. Donc, ce sont des gens qui n’ont pas eu peur. Ils ont risqué leur vie pour prendre des décisions en faveur du pays. Leurs actes démontrent que ce sont des dignes fils.


Propos recueillis par

Bembablin DOUMBIA

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